Crème de brocoli

Nous sommes tous tombés un jour ou l'autre sur un reportage ou un article dénonçant la barbarie de la procédure d'abattage des animaux de boucherie ou la cruauté du gavage des canards et des oies.

Des images difficiles à regarder. Et pourtant... Qui peut honnêtement affirmer que cela l'a poursuivi au point de le contraindre à renoncer à une terrrine de foie gras truffé ou à un filet pur tout juste saisi? Certains d'entre nous auront tout au plus ressenti comme l'ombre du début d'un soupçon de scrupule - totalement évanoui dès la première bouchée.

Comment expliquer que ces images, pourtant on ne peut plus explicites puisque le plus souvent utilisées dans le cadre de propagandes militantes, n'aient pas davantage d'impact sur les êtres délicieusement civilisés que nous sommes?

Je pense que c'est tout simplement une question de distance: il y a tellement loin de cette violence au magnifique morceau de boeuf dans l'étal du boucher que notre cerveau n'a pas beaucoup de mal à jeter vite fait un voile pudique sur la relation de cause à effet qui les unit. Par ailleurs, sommes-nous sûrs que c'est bien le cerveau qui est aux commandes dans ces moments-là? Car si ventre affamé n'a pas d'oreilles, il se pourrait bien que palais gourmet n'ait pas non plus de conscience...

Cela dit, les scrupules ne sont pas toujours aussi faciles à étouffer.

Mon petit mari étant très friand de homard, je décide de profiter de notre traditionnel weekend de Carnaval à la mer pour l'inviter, pour son anniversaire, dans un restaurant où on travaille cette flamboyante denrée. Nous portons notre choix sur La Fourchette, une adresse à La Panne que je recommande chaleureusement (accueil très sympathique, cuisine pleine de goût(s), à la fois simple et raffinée - un thon rouge mi-cuit sur lit de purée et sauce au wasabi sublimissime). Une seule ombre au tableau: le vivier se trouve dans la salle du restaurant...

Je peux comprendre les raisons qui poussent les restaurateurs à exhiber ces mini-camps de concentration pour crustacés de luxe (garantie quant à la fraîcheur du produit, aux conditions dans lesquelles il est conservé, ...) Mais là, du coup, c'en est fini de la confortable distance du consommateur: plus d'intermédiaires, c'est la chaîne alimentaire réduite à sa plus simple expression, le prédateur face à sa proie!

Une fois la commande passée, nous avons tenté de profiter de l'apéritif et de l'entrée tout en nous efforçant d'oublier que nous étions d'abominables homardicides. C'était sans compter sur notre fille cadette, sa logique scientifique, et son goût prononcé pour les questions qui dérangent.

La tension est devenue carrément insoutenable lorsque la patronne a plongé la main dans le vivier pour en extraire notre victime et qu'elle a soumis son choix à notre approbation ("Dis Papa, tu crois qu'il sait qu'on va le tuer? Et ses copains, tu crois qu'ils sont tristes?"). Dur dur...

Enfin, ça n'a apparemment pas empêché l'Homme d'apprécier:-)

Une recette de soupe à consommer sans scrupules:

Ingrédients:

  • 800 gr de brocolis
  • 400 gr de pommes de terre
  • 200 gr de carottes
  • 200 gr d'échalottes
  • qqs branches de céleri
  • 3 gousses d'aïl
  • 3 litres d'eau
  • 3 cubes de bouillon de volaille dégraissé
  • 2 c. à s. d'huile d'olive
  • sel, poivre, muscade

Nettoyez les brocolis puis détaillez-les en bouquets. Epluchez les pommes de terre et les carottes, puis détaillez-les en petits morceaux. Coupez les branches de céleri en petits tronçons. Réservez.

Epluchez et émincez l'aïl et les échalotes. Faites-les revenir 5 minutes dans une grande casserole avec l’huile d’olive chauffée à feu doux. Ajoutez ensuite tous les autres légumes ainsi que l’eau et les cubes de bouillon.

Assaisonnez, puis laissez mijoter à feu doux la préparation pendant 30 mn, jusqu’à ce que tous les légumes soient bien cuits.

En fin de cuisson, mixez et corrigez éventuellement l’assaisonnement.

Bon appétit!

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